28 déc. 2010

When You're Strange


Ce rockumentaire ne vous apprendra rien de vraiment nouveau sur les Doors, à moins que vous ne connaissiez pas grand chose de ce groupe. Mais justement, pour ce qui ne connaissent pas grand chose à ce groupe, je ne peux que vous conseiller, si vous deviez choisir entre le biopic d'Oliver Stone et le travail de Tom DiCillo (qui répond là pourtant à une commande de la maison de disque), de choisir ce dernier, tant on est ici à mille lieues de l'iconisation et de la romantisation du frontman indéniablement charismatique qu'était Jim Morrsion.

Et s'il est impossible de séparer l'histoire de la carrière du groupe de celle du Roi Lézard, DiCillo et son narrateur (Johnny Depp, au poil) ont l'intelligence de raconter ces deux histoires, intimement liées, et de nous rappeler (et il le savait) que Morrison n'était rien sans les trois autres, et inversement, sans condescendance ni . Le point fort de ce documentaire est aussi de nous rappeler toujours le contexte de ces 4 ans et des poussières qu'a duré la carrière des Doors, ce groupe jamais très politisé mais trainant une aura de souffre et de liberté, pleinement dans son époque et conscient de celle-ci.

Étrange carrière pour un groupe à part, sans vraiment de descendance, de ce conglomérat hétéroclite d'horizons (jazz, classique, flamenco, poésie, magie...), et When You're Strange en est la trace, le bel hommage juste et simple, loin des clichés sulfureux qu'Oliver Stone, lui, avait aimé grossir dans son biopic. Ici, au fond, c'est plutôt la musique et non les faits divers qui entraine le film et n'est-ce pas, au final, ce qui restera des Doors ?

Pour l'anecdote, j'ai été amusé de voir à la production de ce documentaire un certain Dick Wolf, que je connaissais plutôt comme producteur du pénible univers sériesque des Law & Order (New York Unité Spéciale, Section Criminelle, etc...). Il semblerait que ce même Dick Wolf soit un fan absolu des Doors et qu'il n'a pas hésité une seconde à produire quand il a su que le documentaire se montait. Merci donc à Law & Order, d'une certaine manière !

27 déc. 2010

Machete


Objectivement, Robert Rodriguez nous étire une fausse bande-annonce (tirée du projet Grindhouse) de 5 minutes sur 1h45, et ça se voit. Rodriguez bricole une scénario que n'auraient pas renié les productions Cannon, gère son casting façon club med (le potentiel du personnage de Don Johnson est clairement sous-exploité et la miss Lohan est là pour les nichons) et on l'a connu plus inspiré question réalisation.

Mais ne vient-on pas voir Machete aussi pour ce genre de défauts, ou en tout cas sans illusion aucune quand au fond et à la forme dudit objet ? Nous ne sommes pas chez Godard ou Bergman, alors il est tout de même plutôt facile de passer outre ces menus défauts. Car Machete est un pur plaisir bis/pop-corn, avec du big gun (et de la grosse lame), du big tits et de la punchline (et deux ou trois banderilles envers la politique de gestion des flux migratoires au niveau du Rio Grande). Et des acteurs qui savent certes qu'ils ne sont pas ici pour la course aux oscars, mais qui font le job à commencer par De Niro, visiblement ravi de cabotiner façon facho redneck, et par les très charmantes et convaincantes Jessica Alba et Michele Rodriguez. Et il y a un petit plaisir, façon revanche, de voir les rôles s'inverser et cette sale trogne de Trejo foutre une branlée au gros pèpère de Seagal (dans son tout premier rôle de bad guy). Enfin, rayon bisserie, Rodriguez sait quand même ouvrir les vannes avec quelques scènes inventives, entre un rappel avec 15 mètres d'intestins, une crucifixion plutôt hard et un final très western façon Fort Alamo entre clandos mexicains et bouseux blanc-bec tendance KKK.

Alors, au final, si Rodriguez est quand même loin de son Planète Terreur ou de sa Nuit en Enfer, il arrive tout de même à remplir le contrat, celui de proposer un bis craspec et fun, décomplexé et fier de son statut de péloche bis. Machete reste ainsi jubilatoire, même si Rodriguez n'a vraiment pas forcé son talent sur cette péloche-ci. Souhaitons tout de même qu'il se racle la soupière un peu plus pour la prochaine fois.

23 déc. 2010

Inception


J'étais pourtant le client idéal : scénario alambiqué juste ce qu'il faut (introduction labyrinthesque au possible), bonnes idées (les défenses du subconsient qui cherchent l'auteur du rêve, le personnage de Cotillard), caméra brillante, prouesses techniques (les scènes en apesanteur dans l'hôtel sont bluffantes) et casting haut de gamme (Leo Di Caprio se bonifie avec l'âge, Cotillard a la classe, Ellen Page confirme tout le bien que je pense d'elle...).

Mais si ce n'est pas un mauvais film, disons tout de même qu'il est possible qu'on en ait fait beaucoup trop autour de ce film. Très solide sur beaucoup de points, Christopher Nolan pêche pourtant ici par ambition, tant il semble vouloir nous épater plutôt que de nous émouvoir. Il rate ainsi quelques points intéressants comme les soi-disantes architectures labyrinthiques des différents rêves (quasiment inexploitées), la fin ouverte est un peu facile (dans ce genre de film, une telle fin frise le cliché), la séquence neigeuse jamesbondesque est plutôt raté et le concept d'inception est complétement sous-exploité. En effet, si l'implantation d'une idée dans l'esprit du personnage de Cillian Murphy est sensée être l'une des deux intrigues principales, toute cette partie de l'histoire n'est guère immersive et sa conclusion est torchée à la truelle.

Mais surtout, là où Nolan se plante, c'est dans l'émotionnel du monde du rêve. Alors que ce monde-ci est sensé être régi par les émotions, les rêves apparaissent toujours froids, durs, glaciaux, carrés, sans aspérités, chirurgicaux. Seule la relation entre Leo et Cotillard développe un tant soit peu cette relation onirisme/émotion et offre quelque possibilité d'attachement à ces deux personnages (pour les autres personnages, et exception faite de celui d'Ellen Page, difficile de ressentir quoique ce soit envers eux, simples rouages dans une mécanique de grand casse très Ocean's Eleven, moins cérébral certes, moins "sérieux" mais aux seconds rôles pourtant plus étoffés). Le reste n'est pas plus immersif et touchant qu'un blockbuster de Michael Bay, même si c'est un peu plus intelligent.

Blockbuster, donc, un chouia au-dessus de la moyenne par son concept et le talent de mise en image de Nolan, ce n'est pourtant qu'un blockbuster parmi d'autres et loin d'être le chef d'oeuvre annoncé et encensé : Inception, déception.

16 déc. 2010

Scott Pilgrim vs. The World


Le film à ne pas rater en cette fin d'année 2010 est en train, malheureusement, de passer presque inaperçu. Pour l'anecdote, Scott Pilgrim VS The World n'aura eu le droit, en tout et pour tout, qu'à une seule petite semaine d'exploitation sur Clermont-Ferrand, pour une seule séance par jour à 22h20. De vrais bonnes conditions pour qu'un film trouve son public, n'est-ce pas ?

Mais râler ne changera pas grand chose, et surtout pas le fait que je suis persuadé d'avoir vu de la graine de chef d'oeuvre, là on l'on pourrait voir au premier abord, à coté de l'adaptation de la BD éponyme, qu'une énième exploitation du filon nerdogeek, entre relations sociales plus que bancales, sentiments refoulés, amours compliqués (la Ramona Flowers a 7 ex plutôt coriaces), rock lo-fi et nostalgie 8bit. Ce que Scott Pilgrim est, et qu'Edgar Wright ne renie en rien. Mais Edgar Wirght a l'art rare de savoir mettre en image des éléments improbables tout en offrant une véritable cohérence à ses créations (Spaced, Shaun of the Dead et Hot Fuzz). Et ici, le mélange improbable entre le canevas classique du jeu de baston (battre les sous-fifres et finir par le boss), un instantané plutôt juste et loin de la caricature de l'éternel ado (Scott Pilgrim est d'une immaturité quasi maladive, à contrario de la plupart des relations qui l'entourent, mais Ramona, sous couvert d'indépendance, n'est pas plus forte émotionnellement), une belle histoire d'amour, de l'humour et un visuel jeu vidéo référencé mais jamais too much, et servant l'histoire comme l'utilisation de cette "1-UP", cette vie supplémentaire qui permettra à Scott de prendre enfin sa vie en main, ici, donc, tout cela fonctionne avec un sens de la mesure tout en préservant la folie visuelle foisonnante qui tient de l'équilibrisme, tant la forme et le fond ne forment qu'un tout subtil, grisant et cohérent.

Avec Scott Pilgrim, Edgar Wright persiste, confirme et signe : il est l'un des réalisateurs les plus doués, les plus intéressants et l'un des plus honnêtes de ces dernières années. par sa capacité à ne jamais poser tel quel les influences diverses et gimmicks issus de la sous-culture comics/b-movies/JV que l'on croise dans ses créations, mais plutôt de réfléchir à créer à partir de tout ça un univers crédible et solide, un cinéma divertissant et intelligent. Car ce Scott Pilgrim vs. The World tient ses promesses de blockbuster d'auteur de bout en bout : spectaculaire, intelligent et attachant. Et je n'ai qu'une hâte : que le DVD sorte pour me délecter encore et encore de cette belle histoire d'amour et de cette folie visuelle. Et je suis prêt à parier mon slip que si ce film est un échec commercial, le temps saura donner raison à cette expérience unique.

14 déc. 2010

Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé


Pour l'Ordre du Phoenix, je concluais ma chronique sous la forme d'une question : le Prince de Sang-Mêlé confirmera-t-il le sursaut qualitatif entrevu dans le cinquième volet des aventures du binoclard le plus célèbre de Poudlard ?

Malheureusement non. Sans être un ratage façon Coupe de Feu, David Yates n'arrive pourtant jamais à prendre au corps son film, ses personnages, au point de ne laisser qu'un vague souvenir s'estompant trop rapidement au lendemain du visionnage dudit film.

Quelconque est un qualificatif qui n'avait pas encore été employé pour l'un des films de la saga ; c'est donc fait avec ce sixième volet, ni vraiment raté ni jamais vraiment réussi, même si je lui reconnais toujours deux qualités communes aux autres volets : son casting de seconds rôles et son décorum. Et comme pour le précédent, le début est pourtant plutôt immersif, les affaires des sorciers débordant de plus en plus chez les moldus, et l'arrivée du professeur Slughorn (très bon choix dans le casting en la personne de Jim Broadbent, british habitué aux seconds rôles chez Gilliam, Moulin Rouge, Bridget Jones et bien d'autres) à Poudlard (la première rencontre entre Potter et lui donne lieu d'ailleurs à une scène très potterienne, pleine de folie et de magie) est bien retranscrite, entre élitisme, flagornerie et petits secrets. L'éruption des sentiments, chez Harry Et Ginny, Hermione et Ron, est là aussi plutôt juste et bien dosée et le mystère entourant Rogue, sa relation avec Voldemort et les Mangemorts est également un bon élément du film.

Mais on retrouve aussi les vilains défauts de la Coupe de Feu, à savoir le manque d'homogénéité, le manque de liant dans les scènes et le montage. On retrouve aussi ce ventre mou présent déjà dans le volet précédent, qu'on lui pardonne bien moins ici eu égard au découpage à la truelle de plus d'une demi-heure du film. On s'agace aussi bien plus vite du manque de direction d'acteurs concernant les premiers rôles, Harry et Hermione encore et toujours en tête, et l'on se désole de la faible charge émotionnelle que dégage le film, visuellement joli mais qui a toute les peines du monde à nous faire tressaillir à l'arrivée des Mangemorts dans Poudlard et à nous retourner l'estomac face au choc que constitue le meurtre
de Dumbledore par Rogue.

La saga Harry Potter ressemble de plus en plus à une espèce de chose boursouflée et pourrie de l'intérieur, comme si globalement rien ni (presque, suivez mon regard lorgnant vers le troisième volet) personne n'aurait pu en tirer quelque chose de bon. On pourrait bien dire que le vrai problème des Potter au cinéma est l'œuvre littéraire, pleine de détails et de sous-intrigues (rarement ennuyeuses pourtant), dont ils sont tirés, mais ce serait oublier qu'ils n'ont été fait que pour profiter de l'engouement autour des livres, et que la transposition à l'écran de l'univers d'Harry Potter a avant tout servi un merchandising gigantesque, digne de Star Wars. Et si j'en crois les retours sur la première partie du dernier opus poudlardien, cela semble mal partie pour que je change d'avis en bout de course.

Et si j'avais dis, lors de ma toute première chronique poudlardienne, que je balayais la sempiternelle comparaison livre/film (tout en disant que les livres restent sans coup férir bien au-dessus de leur adaptation cinématographique), je ne peux, à l'heure actuelle, que vous dire que la relecture des 7 tomes vaut bien plus que toute cette pellicule gâchée.