16 mars 2010

Twilight, chapitre II : Tentation


Pour sensiblement les mêmes raisons que le premier chapitre, mais avec des défauts en plus, ce second volet de Twilight n'est pas une franche réussite. Là où Fascination relevait la tête régulièrement en faisant un film intéressant sur l'adolescence (peut-être par l'envie même de la réalisatrice d'alors, Catherine Hardwicke, de traiter ce sujet qui l'intéressait déjà dans ces deux précédents films, Thirteen et Les Seigneurs de Dogtown), Tentation possède, sur ses 2h et quelques de péloche, en tout et pour tout 3/4 d'heure bien foutus et pas ridicules, chronique d'une dépression adolescente, teintée d'envies légèrement suicidaires par la recherche de sensations fortes, où Bella retrouvera un semblant de sérénité par sa relation avec Jacob, où un père un peu à la ramasse tente tant bien que mal de garder un lien avec sa fille.

Mais dès que la mythologie de l'histoire repointe le bout de son nez, tout ça redevient bien ennuyeux, sans beaucoup d'intérêt. Tout l'aspect fantastique, le bestiaire est jusqu'ici raté, entre maquillages blafards (qui accentue en plus l'indigence d'un acteur comme Pattinson) et transformations de garous quasi inexistante (tout va trop vite). Dans l'océan de scènes d'action ratées surnage, de par l'ambiance crépusculaire que donne le titre Hearing Damage de Thom Yorke à la séquence, la traque dans les bois d'une vilaine vampire, à la recherche de Bella, par les loup-garous. Le reste n'est que ralentis, effets vaporeux, stop-motion... Et que dire de la relation Bella/Edward, tout en hystérie des deux côtés, sacrifices déchirants, répliques dégoulinantes et définitives d'ode à l'amour éternel, du genre de ces coeurs gravés dans l'écorce des sapins de la cour d'un lycée ou les tables des aires de repos de la côte atlantique. Même l'ambigüité sexuelle (toute relative, mais la miss Stewart avait le regard qui sentait le stupre dans le premier) du premier volet disparaît pour une bouillie pathétique.

Contrairement au premier, ce second volet flirte plus que dangereusement avec le nanar de luxe, et sans ces 3/4 d'heures (grosso modo de la 25èmin jusqu'à une grosse heure du film) où Jacob, dit UltraBright vu le sourire (mais l'acteur est bien moins insupportable que Pattinson), et Bella (Kristen Stewart, bien moins convaincante que dans le premier) forme un couple intéressant, il est évident que le qualificatif nanar aurait été apposé aux libellés du film. Du coup, j'en viens à me demander si cette histoire plus que bancale est trahie par sa transposition à l'écran, ou si la transposition à l'écran ne fait que refleter l'indigence au départ de l'histoire.

On me dit dans l'oreillette que je me posais déjà plus ou moins là question pour le premier chapitre. Il ne me reste plus qu'à les lire histoire de confirmer tout ça, et de prier très fort pour que David Slade (que je respecte de part son dérangeant Hard Candy et son efficace 30 Jours de Nuit) se sorte de ce bourbier du futur troisième volet le plus honorablement possible. Et c'est pas gagné, vu l'esthétique bien pécrave déjà développé dans les deux premiers..

14 mars 2010

Showgirls


Il y a dans Showgirls quelque chose que je ne peux saisir. Je ne peux me résoudre à me dire que Verhoeven a fait là son pire film, quand bien même les Razzies l'aient récompensé pour ça. Pour l'anecdote, il est d'ailleurs l'un des réalisateurs nominés à être venu à la cérémonie recevoir ses prix et s'est fendu d'un discours (source : Encyclopédie du cinéma ringard, François Kahn, article Greluche et Razzies, page 148-149 et 253), ovationné par le public, remerciant les États-Unis pour le récompenser de faire, je cite, un cinéma malade, pervers et dégoutant, les mêmes raisons qui ont longtemps banni Verhoeven du cinéma hollandais.

Et Showgirls est sans aucun doute son film au mauvais goût le plus frontal, ne serait-ce que par les séquences de danse topless, avec moults effets pyrotechniques, atours clinquants et tableaux porno-chic. Kyle McLachlan, qui arbore là sa plus vilaine coupe de cheveux (et qui joue le directeur artistique du show, vu dans Dune, Twin Peaks et aussi monsieur Bree Van Der Kamp chez nos ménagères télévisuellement désespérées) et Gina Gershon (qui joue la star du show, vu auparavant dans le malin Bound des frangins Wachowsky) y sont toujours dégoulinant de perversité et de champagne, saupoudré de cocaïne, la braguette toujours prête à sauter. L'hystèrie faite corps par le personnage de Nomi Malone (l'héroïne, jouée par Elisabeth Berkeley, qui s'est ici défintivement sauvée après le gong, pour les plus anciens d'entre nous...) traverse sans repit tout le film, usant le spectateur. Peu alerte de ce qu'il allait voir, elle peut même trahir celui qui, s'attendant à reluquer un soft-porn hollywoodien friqué avec plein de bombasses remuant du popotin, tombe sur une succession de colères, de caprices, de scènes d'allumeuses. Et quand la donzelle accepte enfin de voir le loup, le pauvre bougre ne peut honnêtement pas espérer voir venir l'ombre d'une demie-molle à la vision d'une walkyrie aquatique, chevauchant son mâle (Kyle, à la mèche malgré tout toujours en place) avec une telle vigueur que l'on peut craindre pour la santé du pubis, du bassin voire du membre enfourné dudit mâle.

Oui, tout cela est cinématographiquement laid, fatigant, dégoulinant. Voire ennuyeux. Mais comme je l'ai dit, le fait que ce soit le furieux batave qui soit à la baguette de cette étrange péloche ne peut que me poser question. Certes, il a toujours aimé choquer, montrer la violence et l'inégalité des rapports humains, et que chez lui sexe et pouvoir sont toujours intimement lié (je crois que je l'écrivais déjà dans ma chronique de Basic Instinct).Et sans en faire son chef d'oeuvre maudit et incompris, son grand film malade, Showgirls ne pourrait-il justement pas être sa vision (et la vision du scénariste Joe Eszterhas, les deux compères déjà à l'œuvre sur Basic Intinct, et dont je conseille aussi Jade, de Friedkin, avec la vénéneuse Linda Fiorentino) des États-Unis et plus généralement de notre société occidentale, ou peut-être juste d'Hollywood, une vision outrancière et caricaturale, mais dont les récompenses aux Razzies sont justement la marque de la justesse de celle-ci ? Car ce ne serait pas la première fois que Verhoeven nous traterait un sujet quelconque (ici Las Vegas et l'industrie du sexe) pour nous parler de ce qui sous-tend tout ça et de ce que cela dit des hommes et de leur société...

Par le téléscopage de Las Vegas, pays clinquant, bling-bling, excessif, montant au pinacle aussi vite qu'elle les broie les créatures qui y passent, et de Nomi Malone, ex-prostituée prête à tout, arriviste, allumeuse, hystérique, peu soucieuse des gens qui s'attache à elle et toujours en fuite, Verhoeven expose et explose sur l'écran un monde auquel on ne peut s'attacher par sa vacuité, son inhumanité et sa violence. Et si le film reste raté (ça arrive même aux meilleurs...), c'est du Verhoeven, pur et dur. Et il ne peut qu'inspirer le respect par une telle hargne et une volonté à creuser toujours et encore un tel sillon cinématographique, aux thématiques puissantes et solidement accrochées à leur instigateur.

11 mars 2010

Basil, Detective Privé


Soyons honnêtes. Je ne vous aurais jamais parlé de ce Disney de 1986 si ma fille de trois ans ne se le regardait pas en boucle depuis 4 jours, midi et soir. Qui plus est, les longs-métrages de tonton Walt post-Taram ne trouvent guère leur place dans mon cœur de cinéphage (et que dire des affreux direct-to video ?...).

Mais Basil (et peut-être son visionnage avec mon ainée) a fait jaillir chez moi une agréable sensation de regarder un divertissement familial dans le bon sens du terme. Issu d'une série de bouquin, dont l'influence avouée et affichée est celle de Mister Holmes, Sherlock de son prénom, ce court dessin-animé (71 min seulement) nous présente donc un Basil, détective privé, un peu ailleurs, pas très sociable, mais plutôt doué, en lutte contre son ennemi juré, Ratigan, qui ourdit un terrible complot contre le royaume des souris.

Encore assez exempt de politiquement correct (ça fume, ça boit mais on s'en inquiète pas plus que ça pour nos chères têtes blondes), Basil est une enquète somme toute très classique mais efficace, à l'animation gardant encore un certain cachet (ça commencera à se gâter avec la Petite Sirène), au chansons pas pénibles et correctement chantées sans envolées lyriques à la Mariah Carey et au doublage français avec un minimum d'allure. Si notre charlot national de Gerard Rinaldi n'a pas la classe de Vincent Price en Ratigan, il joue tout de même sa partition avec sérieux et efficacité.

D'un point de vue technique, c'est d'ailleurs le premier Disney à intégrer des CGI pour une séquence entière (la bataille finale dans Big Ben entre Basil et Ratigan), dans un grand moment (pour un coup d'essai c'est un coup de maître) de suspens et de tension dramatique dans un enchevêtrement de rouages et d'engrenages. D'autres séquences valent le détour, comme la course-poursuite dans le magasin de jouets, la scène du tripot, avec un bon numéro chanté, ou la poursuite aérienne. Coté personnages, si Ratigan tire son épingle du jeu, son sous-fifre Fidget (la chauve-souris boiteuse) est détestable comme il le faut et Dawson, par son maniérisme très british, apporte un peu de légèreté à la grandiloquence et l'omniscience d'un Basil.

Pourtant, il est vrai qu'en terme d'esprit en général, d'une certaine folie, d'une certaine volonté d'avant-garde, ou d'originalité, Basil a très nettement cette odeur du creux de la vague des 80's pour Disney. On est ici loin de tutoyer les sommets musicaux d'un Aristochats ou d'un Livre de la Jungle. Ratigan, bien que réussi, est loin de valoir quelques grands méchants façon Cruella Denfer ou la Reine de Blanche-Neige. Malgré cette séquence de haute tenue dans Big Ben, elle ne vaut pas l'émerveillement que j'ai encore à la vision de la montée du chapiteau sous la pluie dans Dumbo, et pas un moment je ne sens ce souffle qui parcourt un chef d'oeuvre comme Alice Aux Pays des Merveilles (pour moi, entre tous, le meilleur des meilleurs de chez Disney).

Je suis donc assez sûr que ce Basil ne sera, à juste titre, jamais cité comme l'un des chefs d'oeuvre de Disney, mais il serait tout de même dommage de l'oublier, ne serait-ce que par son ambiance, son rythme et Ratigan. Et ce n'est pas parce que les 80's sont une période creuse (en termes de revenu, entendons-nous bien ; il faut dire que Taram battu par le long-métrage des Bisounours au box-office USA, ça vous plombe une ambiance de travail pour quelques années) pour tonton Walt que sa production a été foncièrement mauvaise. Je trouve a contrario que les 90's, et cette manie de foutre des images de synthèse partout (et des chansons dégoulinantes), sonne le glas qualitatif de Disney. A part peut-être Aladdin, je veux bien, à partir de la Petite Sirène, tout jeter à la poubelle (avec en tête Tarzan et Dinosaure), et regarder encore une vingtaine de fois d'affilée Basil Détective Privé. Avec ou sans ma fille.

2 mars 2010

Dexter, saison 1


Malgré une petite période où les Experts (CSI-Las Vegas, en VO), sous la houlette d'un Grissom bien écrit et bien campé, ont pu m'intéresser, je reste peu friand de séries policières, qu'elles viennent des States ou d'ailleurs. Je dois tout de même bien vous avouer une ou deux exceptions, comme Cadfael (il faut dire que le contexte moyen-âgeux et la présence de Dereck Jacobi y étaient pour beaucoup), McCallum (là encore, John Hannah y était pour beaucoup) ou encore l'oTVni Twin Peaks. Et j'émettrais quelques réserves positives envers les sympathiques NCIS (quelle idée de faire un spin-off, tout de même...) et Bones (merci le duo d'acteurs, sexy et drôle). Mais l'overdose sur le hertzien d'experts de tout poil (je vous fait la liste ?), de policiers new-yorkais, de maths appliquées à la criminologie (Numbers est l'une des plus ridicule), de dossiers froids et d'agents du FBI loin de disparaître me donne la nausée avec leur victimologie manichéenne sans borne, avec en point d'orgue l'affreux Esprits Criminels, avec ses flics cognitivistes forcenés, ce discours sécuritaire et ses criminels (plus monstres qu'êtres humains, d'ailleurs on leur nie le droit d'être des hommes) plus dangereux qu'Hitler et Ben Laden réunis, qui putréfient tous les bons citoyens de la patrie à la bannière étoilée.

Et dans ce paysage, cette première saison de Dexter arrive vraiment comme un cheveu un cheveu sur la soupe judiciaro-télévisuelle. Nous voilà avec des éléments classiques (tueurs en séries machiavéliques, flics, famille de flics, tension de hiérarchie...), dans une Miami haute en couleur (seul point faible et un peu cliché de la saison, la musique cubaine trop présente à mon goût), où Dexter, enfant adopté dans une famille de flic (sa sœur adoptive est une collègue), est, le jour, expert en traces de sang à la criminelle de Miami et, la nuit, traqueur et serial killer de serial killer. Et là est la vraie originalité de cette série : nous placer du coté du traditionnel grand méchant monstre.

Mais aussi monstrueux qu'apparaissent ses actes, le personnage est humain (et l'on s'y attache très vite, adhérent presque à son système de valeurs), et c'est sur ce point que la saison s'attarde. Son histoire personnelle est d'ailleurs au centre de cette saison, en plus d'un imaginatif Tueur de Glace qui semble narguer Dexter. Entre la relation avec sa sœur (Debra, jouée par Jennifer Carpenter, fliquette ambitieuse et maline, jurant comme un charretier), sa relation amoureuse avec une jolie nénette (Rita, jouée par Julie Benz, vu dans Buffy et Angel dans le rôle de Darla) avec deux enfants et un ex-mari violent, ses relations de bureau et les souvenirs de son père adoptif, véritable mentor, Dexter nous raconte sa vie (les épisodes nous sont commentés par la voix de Dexter) faite de mensonges, de non-dits et comment il s'arrange avec ça, avec ses relations humaines dans lesquelles il ne voit uniquement comme intérêt celui de ne pas éveiller de soupçons (quoique...). Mais peu à peu, Dexter évolue (sa confrontation avec un psy aux pratiques étranges dans l'épisode Shrink Wrap, ép 08, est un véritable tournant pour lui).

Et cela est un vrai bol d'air dans la vision classique, caricaturale du serial killer, façon Esprits Criminels, CSI-Miami et un paquet de croûtes. Enfin, il n'est pas cet être toujours théâtral, grandiloquent et surtout monstrueux quoiqu'il arrive (a contrario, Dexter est adorable, prévenant avec Rita et ses enfants, sans ambiguïté aucune), sans aucune once d'humanité. En niant l'humanité de ces personnages, nous nous rassurons et nous voilons la face sur notre propre capacité à la monstruosité. En montrant, au fil de cette première saison, le parcours de Dexter depuis son enfance, la série nous dépeint un être humain dont la normalité sociétale, bien que feinte ou jouée en grande partie, est sa porte de sortie, son moyen de survivre et de vivre. Est-il vraiment seul dans ce cas, au delà de sa condition de serial killer ?

A part, comme je l'ai noté plus haut, le pénible (à mes oreilles) cliché musical Miami/salsa, cette première saison de Dexter est de haute volée : casting aux petits oignons (Michael C. Hall, déjà très bon dans Six Feet Under, tient son personnage avec justesse et malice), réalisation efficace (voire classieuse, limite giallesque dans l'épisode Seeing Red, ép. 10, ou onirique dans les dernières minutes du season finale Home Sweet Home, ép. 12), arc narratif tenant sur une saison, sans cliffhanger final mais introduisant quelques éléments pour les futures saisons (en particulier les soupçons d'un flic de la brigade envers Dexter). Et quelle bonne idée de faire de l'arc narratif de cette première saison les origines de Dexter (car tout nous est expliqué), ce qui plante le personnage et évite les mystères trainant en longueur.

Mais une question nous taraude à la fin de cette première saison : mais où met-il les sacs poubelles des restes de ses victimes ? Parce qu'à en croire sa boite à souvenirs, il y en a bien deux bonnes douzaines. Et deux bonnes douzaines de sacs poubelles pleins de morceaux de cadavres, c'est loin de passer inaperçu. Réponse dans la seconde saison, peut-être...