28 oct. 2010

Hostel


Souvent cité comme étant à l'origine du déferlement de toutes sortes de torture-porn façon Saw (pfff....) et east-sploitation (l'ancien bloc de l'est semble exciter l'imagination des scénaristes), les deux souvent mêlés, Hostel est pourtant bien plus malin que ça, et loin d'avoir pour unique but d'enchaîner les séquences craspecs de tortures sans véritable discours.

Eli Roth prend ainsi un vrai plaisir à nous mener en bateau pendant une longue première partie, sorte de clone de comédie étudiante US volontairement lourdingue (baise et défonce dans la vieille Europe, seul objectif du voyage de deux étudiants américains) et où la promesse d'un paradis de la chagatte, d'un supermarché post-soviétique de la foufoune va les faire basculer dans la seconde partie du film, où Eli Roth place peu à peu ses pions (les longs passage très dérangeants où les filles discutent en VO, sans sous-titre ni pour nous ni pour les personnages...) et resserre l'étau d'une horreur ultra-libérale.

Car, nonobstant la volonté de réaliser un film de genre, Eli Roth nous propose une vision, une certaine idée du monde dans lequel nous vivons. Et ce n'est pas la chute du Mur et ses conséquences qu'il filme, mais plutôt ce dans quoi nous nous vautrons allégrement ; situer l'action dans l'est de l'Europe est tout simplement plus évocateur, plus parlant, plus directement opposable à la toute-puissance consumériste US (il joue ainsi avec les clichés d'usage sur l'Europe de l'est) qu'incarnent ses trois petits cons. Et n'oublions pas non plus que le premier mec à disparaître est un islandais : le commerce ne s'attache pas du détail des nationalités, mais apprécie le terreau de la misère pour s'y développer...

Hostel n'a aucune volonté spectaculairement voyeuriste, et cela a pu dérouter, certains s'attendant à la vision bien plus intensive de chairs à vif et de flots d'hémoglobine. C'est un brûlot, tout aussi ou même plus violent par ce qu'il démontre que par ce qu'il montre. Un film marquant, à part, un des grands films craspecs de ces 10 dernières années. Suffisamment en tout cas pour avoir fait fleurir un paquet de péloches se réclamant plus ou moins de la même lignée mais rarement (jamais ?) à la hauteur de la taloche XXL qu'est Hostel.



PS : juste pour l'anecdote, sachez qu'on retrouve à la BO d'Hostel l'excellent Nathan Barr, celui-là même derrière la non moins excellente ambiance sonore de True Blood.

25 oct. 2010

All the Boys Love Mandy Lane


Ne nous attardons pas sur les affres de l'exploitation ciné de cette péloche, datant déjà de 2006, tout fraichement sorti en DVD par chez nous, et longtemps bloquée par les frangins Weinstein, producteur dudit film, refroidis alors par l'échec commercial du dyptique Grindhouse Planet Terror et Death Proof. A la vision, du film, disons-le franchement : ils ont fait les cons.

Voici là une drôle de péloche, à la croisée des chemins d'Halloween, Bowling for Columbine, Carrie et Virgin Suicides. Avec une musique quasi anachronique, ou en tout cas en décalage avec les images, qui accompagne ainsi la camera flottant amoureusement autour de la troublante Mandy Lane, on n'est jamais vraiment sûr de ce que l'on regarde, et c'est par là que le malaise s'installe. Même si, peu à peu, on se rend compte de ce qui se met en place, la caméra n'est jamais vraiment neutre, laissant ainsi le charme de Mandy Lane nous happer, nous offrant un univers adolescent priapique, décérébré, mais pourtant terriblement pathétique dans sa recherche d'amour.

Slasher et chronique adolescente, Jonathan Levine réussit à tout point de vue ce film et nous offre en plus une vraie révélation : Amber Heard. Innocence, trouble et mystère, la jolie blonde joue, incarne, est Mandy Lane, sans fausse note, évanescente et omniprésente. Tous les garçons aiment peut-être Mandy Lane, mais les écrans l'auraient sûrement adoré, car Mandy Lane a été calibré pour le cinéma. A croire que les Weinstein sont passés à coté du charme. Quels cons, ces frangins...

24 oct. 2010

True Blood saison 3


Après une deuxième saison excessive, grand-guignol, charnelle et intense, on pouvait facilement craindre une baisse de forme pour la troisième. Si l'on est loin du priapisme de la précédente saison, cette troisième fournée annuelle des aventures de Sookie Stackhouse n'est pas sans qualité, loin de là.

Alors oui, si les séquences de sexe débridé, de poitrine dénudée ont basé l'essentiel de votre intérêt pour cette série, la troisième saison ne peut que vous décevoir. En effet, celle-ci est plus politique mais aussi plus sentimentale, plus psychologique, moins débridée. La reconnaissance des droits des vampires (la progression du vote de l'amendement est en filigrane une bonne partie de la saison) fait son chemin en façade, mais en coulisse les pions se déplacent, les alliances se nouent et avec la Grande Révélation (celle qui a révélé l'existence des vampires) se pressent derrière d'autres créatures dont le secret de l'existence ne tient qu'à un fil.

Dès lors, on ne s'étonnera guère de l'arrivée de garous divers, de métamorphes et d'une ou deux autres créatures dont je tairai le nom au risque de spoiler. On ne s'étonnera pas non plus de découvrir l'animal politique qu'est véritablement le vampire, à changer presque radicalement la perception de certains personnages. Coté humain, ceux-ci ont une fâcheuse tendance à être dépassé par ce monde débarquant dans leur réalité, subissant de plein fouet l'avènement de ces créatures, à commencer par Tara et le touchant LaFayette, l'un des personnages les plus attachants de True Blood.

Alan Ball poursuit ainsi avec constance (la saison est toujours organisée de la même façon : peu de question en suspens, aucune ellipse entre deux saisons, évolution des personnages) son fangshow trouble, décortiquant l'avidité liée au pouvoir et une Amérique sclérosée et fermée. Et l'on se demande bien ce qui attend la ville de Bon Temps pour la saison à venir tant le dernier épisode ouvre de portes, suggère des bouleversements à venir.

True Blood est le meilleur show, télé et cinéma confondu, de vampires et autres monstres depuis des années, car il ne passe jamais à coté des mythes, ne nie jamais les monstres, ne cherche pas le spectaculaire dans la monstruosité mais plutôt les failles, les désirs, les espoirs et les troubles. Et ça, Alan Ball nous a démontré par le passé qu'il savait faire avec Six Feet Under. Et il est en train de le réussir avec True Blood.

13 oct. 2010

Bienvenue à Zombieland


Difficile de ne pas être emballé par ce que propose Zombieland, à commencer par son introduction originale et efficace et son générique apocalyptique au son du Metallica grande époque ( avec Cliff Bole à la basse) "For Whom The Bell Tolls". Difficile de ne pas être emballé par le casting quatre étoiles, Woody Harrelson en tête en cowboy allumé et torturé (avec lui le banjo et le petit air de Délivrance deviennent littéralement mortels...). Difficile de ne pas tomber en pâmoison devant le gros cameo de Bill Murray dans le rôle d'un Bill Murray ultra hollywoodien, villa, robe de chambre en velours rouge et tout le bataclan. Difficile de s'ennuyer, enfin, dans ce zombie/road movie/comédie sans baisse de rythme, fun mais pas parodique, respectueux du genre, avec pas mal de bonnes idées (les fameuses règles de survie érigées en running gag, le détournement de la traditionnelle scène de contamination/élimination, l'absence totale de simili pouvoirs résiduels...) et offrant un final à la hauteur de l'ensemble.

Mais je ne crierai ni au génie ni au culte. Car si Zombieland est sans aucun doute un excellent film de zombie, je n'ai pu m'empêcher en le regardant de penser à Shaun of the Dead, le chef d'oeuvre du trio Wright-Pegg-Frost, tant ces deux films sont similaires par bien des points, et à se demander même si Zombieland n'est pas la réponse US aux zombies d'Albion. Entre cette volonté de ne pas jouer sur l'héroïsme, de proposer un un vrai film de zombies mais pas que, d'utiliser le quotidien et la routine et de la pervertir avec des zombies, cette volonté des personnages de maintenir ou de retrouver une cellule familiale rassurante, diffcile de ne pas voir un sérieux lien de cousinage entre les deux films.

Pourtant, là où Shaun of the Dead offre une grande subtilité (ne serait-ce que dans sa première séquence où nous passons tous pour des zombies) même dans la terreur ou les aspects les plus beaufs des personnages, Zombieland apparaît comme un blockbuster de qualité certes, mais ne jouant pas tout à fait dans les mêmes sphères de subtilité, où les personnages, même bien écrits, sont plus typés (le geek a désormais, si l'on en doutait encore, un potentiel héroïque et sexy ultra bankable) et le spectaculaire reste la clef de voûte. Et l'arrivée pour 2011 d'une suite (dont l'intérêt artistique et scénaristique nous laisse dubitatif) achève de me convaincre que j'ai regardé un film de zombie bien plus hollywoodien qu'il n'y paraît. Et bien que je me sois délécté de Zombieland, il n'est pas prêt de faire tomber son illustre ainé Shaun of the Dead de son piédestal.

4 oct. 2010

Solomon Kane


Si les films de sword & sorcery se font rares sur les écrans (il faut dire aussi que la fantasy en général n'est pas très bien lotie au cinéma), le genre n'est pas prêt de redevenir bankable avec Solomon Kane. Raté dans ses grandes largeurs, et hormis une introduction nord-africaine plutôt convaincante et prometteuse, le film n'est jamais à la hauteur de ses ambitions.

Enchainement de clichés (aaahhh, la sempiternelle marche seul dans la nature pour trouver sa voie, l'époque est sensée être sombre et dure et sans espoir donc il faut qu'il pleuve presque tout le temps, le final "vous avez lâché la bête maintenant ça va chier pour les vilains" mais pas de bol le film s'est planté allégrement au box-office mondial...), ellipses plutôt étranges (mais comment la famille de pilgrims retrouve Solomon Kane ? Et quel intérêt de marquer la jeune et pure damoiselle ?)), ce sont aussi un manque de lyrisme barbare et de charisme du héros (James Purefoy, vu à la télé dans Rome en Marc Antoine, nous fait une pâle copie de Hugh Jackman dans Van Helsing) qui font surtout défaut à Solomon Kane. Et que dire du ou des méchants qui, à la vue des premières minutes du film, s'annonçaient plus charismatiques : on nous offre ici un sous Général Kael (cf Willow et le lien hypertexte pour que le nom n'évoque rien) et un sorcier bien faiblard (on aurait pu attendre beaucoup plus de tout ce décor de miroirs maléfiques). Même certaines bonnes idées comme ce prêtre qui garde ses anciennes ouailles mortes-vivantes dans la crypte de son église ne sont jamais correctement exploitées.

Et malgré un casting de seconds rôles plutôt classe (Pete Postlethwaithe, Alice Krige, Max Von Sydow et la jolie Rachel Hurd-Wood), on en vient rapidement à s'ennuyer et à commencer par noter certains petits détails, lesquels seraient passés totalement inaperçus dans un contexte plus enlevé, comme ce détail qu'a noté avec un à-propos certain ma chère et tendre : qui allume et entretient le feu des torches d'un couloir qui semble peu emprunté, tout du moins par la tripotée de morts-vivants affamés et dont la nécessité pour eux de maintenir cette lumière semble toute relative, voir inexistante ? Et j'en aurais de fait une autre. A la vue de nombreuses séquences (une large moitié du film pour ne pas dire les trois quarts) se déroulant dans le froid, la boue, la pluie, quel secret ont les acteurs pour ne pas mourir de pneumonie ?

2 oct. 2010

Wanted - Choisis Ton Destin


Evacuons d'entrée l'inévitable comparaison avec la BD de Mark Millar (Kick Ass) qui est sensée être le matériau de départ du film : hormis le titre et le nom des personnages le film n'a pas grand chose à voir avec la BD. Il faut dire que l'on voit mal la Paramount (ou un autre studio) poser un gros chèque pour adapter une BD aussi violente et dérangeante. Ceci étant dit, passons dès maintenant à l'épluchage du navet.

Un nanar n'a pas nécessairement un budget rachitique et Wanted en est la preuve, s'il vous en fallait une. Et pour rendre au jardinier ce navet qui lui appartient, les facettes les plus nanardesques ne se situent pas sur les effets spéciaux et scènes d'actions, grand n'importe quoi explosif et jouissif à faire passer Michael Bay pour un esthète de l'épure. Le réalisateur (Timur Bekmanbetov, réal russe aux commandes du plus recommandable Night Watch, mega carton au box office de nos amis à chapka) s'en donne à coeur joie quand il s'agit de faire faire à des véhicules en tout genre les plus improbables cascades (sûrement les meilleurs moments du film). Notons aussi cette volonté de faire des gunfight et des bagarres ni matrixiennes ni Hong Kong style. Mais pour ce qui est du reste...

Vous cherchez un gros truc pas fin qui a préféré mettre l'essentiel de son budget ailleurs que dans le salaire de scénaristes compétents et plutôt dans les scènes qui font boum (et dans 10 secondes d'un plan sur la jolie croupe de la miss Jolie), Wanted est fait pour vous ! N'essayez pas de comprendre l'histoire, elle ne vaut pas grand chose, et tout le monde dans le film le sait (même Danny Elfman qui signe là l'une de ses BO les plus insignifiantes). Deux trois points de morale vous font tiquer ? Pouah pouah pouah, qu'est-ce que vous me racontez là...

Seuls quelques grammes d'intelligence affleureront étonnamment dans la carte postale du monde du travail, entre stress, pressions en tout genre, abêtissement dans l'enfer feutré des open space. Ormis cela, le sieur Timur signe un nanar fier d'être couillon et portnawak, ne misant pas grand chose sur l'intelligence de son propos et en reste de fait bien plus fun et facile à regarder qu'un paquet de croûtes se prenant pour un nouveau mètre étalon filmique. Mais pas de méprise, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, hein ? C'est du navet Tropicana : pur jus, pur premium, avec de la bonne grosse pulpe de navet dedans.