29 août 2013

Cloud Atlas


Grosse, voire très grosse plantade au box office US, succès trèèèès modeste dans notre humble contrée, l'énorme machine du trio Wachowski's-Tykwer n'a clairement pas trouvé énormément de spectateurs avides d'une histoire de l'humanité à travers quelques siècles.

Et sur le papier, on peut difficilement les en blâmer. Trois réalisateurs, un casting jouant tous les rôles à travers toutes les époques, un habillage new age, et surtout un enchevêtrement façon film choral de 6 histoires sur 6 siècles, le tout pendant trois heures, qui a de quoi rebuter.

Bon, après, je ne vous cache pas qu'il y a toujours des clients pour une grande épopée en cinémascope sur la vie, l'univers et le reste. Genre moi.

Et oui, ça sent le casse-gueule. Et j'ai passé une bonne partie du film à craindre que tout ça se plante. Et pourtant, non, cela n'arrive jamais. Tout le film se tient, de bout en bout. Malgré les passages de la tragédie à la comédie, de la SF au oripeaux du 19ème, de l'amour à la violence, du thriller politique à la quête mystique. Malgré les ruptures de ton, les acteurs et actrices jouant 3 4 5 6 rôles, une certaine idée du karma plus ou moins présente tout du long. Malgré tout ce qui ferait que ce film aurait pu être un immense plantage, il est au final l'un des plus beaux et plus grands films que j'ai pu voir en 2013. Et si j'osais en rajouter dans le genre expansif, je m'avancerai jusqu'au 10 dernières année.

Et au delà des qualités des trois réalisateurs, rendons grâce surtout au monteur Alexander Berner qui a su gérer avec un certain brio ces histoires entremêlées, en conservant leur intégrité propre tout en donnant de la cohérence à l'ensemble (et tout ça sur près de 3 heures...).

Et qu'il est bon et beau d'avoir, une fois de temps en temps, un grand spectacle, intelligent, original et émouvant. De sortir d'une salle obscure (en chialant comme une madeleine) avec le sentiment d'avoir vu un vraie réussite cinématographique à tous les niveaux (casting, sfx, montage, photo, réalisation, scénario, musique...), où tout s'accorde, même sur la brèche, et ce sans jamais tomber du côté de la croûte pompière et indigeste. Et bien que le box-office mondial ne lui ait pas rendu justice, Cloud Atlas est juste un très grand film.

Allez. Et affirmant que je n'en fais pas trop, je l'ose. Cloud Atlas est un chef d’œuvre.


16 août 2013

John Carter


Gros échec comptable pour Disney (des têtes sont même tombées), et particulièrement aux USA, John Carter a-t-il donc mérité qu'on ne se déplace que peu (et moi le premier) pour lui ? Rebuté par l'idée qu'Andrew Stanton (Nemo et Wall-E tout de même) réalise en live, que Disney se (re)mette à la SF et par une bande-annonce guère aguicheuse, je suis donc moi aussi passé à côté en me disant que je le verrai bien un de ces quatre sur la petite lucarne.

Quel andouille.

Malgré une entame un peu molle, le film démarre dès l'arrivée sur Mars. Stanton nous déroule ainsi un grand spectacle (quels paysages) bien dosé, aux scènes d'action efficace et surtout à l'esprit pulp/fantasy/aventure très premier degré et particulièrement rafraîchissant, mais aussi dans l'esprit des livres d'E. R. Burroughs dont ce film est librement adapté. On pinaillera cependant volontiers sur le duo d'acteurs vedettes un peu fades (Taylor Kitsch et Lynn Collins), contrebalancé par un casting de seconds rôles de haut vol (Mark Strong, Ciaran Hinds ou Bryan Cranston pour ne citer qu'eux).

On se laisse ainsi facilement transporté par ce John Carter, bercé par l'excellente musique de Michael Giacchino (le grand comparse de JJ Abrams depuis Alias), gros plaisir absolument pas coupable à condition de se rappeler des fois que le cinéma est aussi un divertissement qui n'a pas besoin de se moquer de lui-même pour être intéressant.

13 août 2013

A Scanner Darkly


Philip K. Dick est peut-être bien l'un des auteurs de SF préféré d'Hollywood (au moins une dizaine de films tirés principalement de ses nouvelles), et on ne compte plus les références et influences plus ou moins marquées dans tel ou tel péloche. Ce qui est, pour rester sur les adaptations, au demeurant plutôt étonnant si l'on considère qu'une bonne partie de ses romans reste d'un accès pas si simple (filez Ubik à un profane...). Mettons tout de même un bémol sur cette affirmation en ce qui concerne les nouvelles, plus accessibles tout en restant très dickiennes, dont des films comme Total Recall (dois-je préciser que je parle bien du Verhoeven), Planète Hurlante et Minority Report (même si la fin...) en sont les meilleurs exemples.

Tout ça, au final, pour introduire l'adaptation de Substance Mort (A Scanner Darkly, donc, en VO) par le touche-à-tout Richard Linklater. Où l'on découvre, quand on veut adapter du Dick, que le roman est définitivement plus casse-gueule que la nouvelle. Et si la rotoscopie sied parfaitement aux visions hallucinées des protagonistes (excellente séquence d'ouverture), si le casting est impeccable (ou presque, Downey Jr. en fait tout de même un peu trop), si l'esprit du livre, la narration, les faux-semblants, la perte de repères, la folie qui s'insinue, si tout cela n'en fait pas la plus honteuse des adaptations dickiennes, loin s'en faut, je me donne le droit de bouder quelque peu mon plaisir.

A Scanner Darkly est ennuyeux, sans pour autant se planter, manquant de rythme, ou en tout cas ne réussissant pas à retranscrire la torpeur pesante du livre, avec cependant un emballage formel adéquat et bien pensé. Linklater nous offre un film ni-ni, ni raté, ni réussi, ni pénible, ni emballant. Oubliable mais pas honteux. Mais oubliable tout de même.

12 août 2013

Troie


Superproduction aux arômes de croûte hollywoodienne, casting boursouflé de stars, brushing et bronzage impeccables, et cette faculté hollywoodienne à s'écarter volontiers, et ce plus que dans les détails, de la lettre originelle (pas une ombre ici des ficelles tirées par l'Olympe), Troie paraissait un bel attrape-nigaud pour tout nostalgique du péplum.

Mais pourtant un truc cloche, car ça fonctionne. Et ce n'est pas tant du côté du réalisateur (Wolfgang Petersen, honnête et solide ouvrier de studio) qu'il faut chercher mais plutôt du côté du scénariste, David Bienoff, auquel on doit l'adaptation (avec D. B. Weiss) de la saga Game of Thrones sur HBO. Et sans non plus en faire un chef d’œuvre, on sent tout de même déjà l'amour du jeu de pouvoir, et cette volonté de montrer la puanteur de ces jeux, de leurs justifications, de leur cruauté, de leur violence.

David Bienoff retourne ainsi tout ce qu'on croyait voir, où l'héroïsme n'affleure guère dans cet océan impérialiste et suffisant, si ce n'est dans la lame d'Hector (exceptionnel Eric Bana, qui vole la vedette à tous ces camarades) ; à croire même que Bienoff a pris un malin plaisir à faire passer une grande partie de son casting pour des extrémistes, des fous, des idéalistes bas du front ou des victimes bien contentes de patauger dans leur malheur, à commencer par ses trois VIP ultra beautiful people (Pitt, Bloom et Kruger).

Si on ajoute à cela une réalisation efficace, une violence étonnante et finalement bienvenue (à condition de regarder le director's cut) et des SFX qui tiennent encore sacrément la route 10 ans plus tard (le film est de 2004), Troie nous laisse ainsi à penser qu'on peut toujours, au détour d'un visionnage quelque peu inattendu (ici, grâce à une connaissance qui vous le vend comme l'un de ses films fétiches au détour d'une conversation sur Star Trek qui dévia sur Eric Bana), se faire avoir par Hollywood et ses oripeaux.