30 sept. 2010

Jumper


Bien, bien, bien.

Ca va être vite vu, vu qu'il n'y pas grand chose à dire. De bon, hein, je m'entends.

C'est pas que le concept soit mauvais, elle est même plutôt excitante, cette idée de ces jumpers capables de se téléporter un peu partout (on voyage du Michigan à Tokyo en passant par Londres, le Sphynx et le Colisée), et de ce pouvoir qui les rend oisifs, égoïstes, zappeurs consommateurs, très actuels somme toute.

C'est pas que ce soit mal filmé. Doug Liman, avec Mr & Mrs Smith et surtout La Mémoire dans la Peau, a déjà montré qu'il était largement capable de diriger des scènes d'action solides, sans pour autant délaisser le reste.

Et oui, il y'a bien quelques scènes bien fichues (le duel entre Samuel Jackson et Jamie Bell), les téléportations ont de la gueule (poursuite sympa et imaginative entre Hayden Christensen et Jamie Bell) et pour parler de ce dernier, Billy Elliot crève l'écran et pique à l'aise la vedette à Marcelus et Anakin. Et il est difficile de ne pas être envouté par les grands yeux noirs de Rachel Bilson. Voilà, j'ai fait le tour du positif.

Car le reste est d'un intérêt superficiel et bien que le film soit court (1h25) et que des suites étaient prévues (2011, peut-être), je me demande si l'heure manquante (si quelqu'un a compris quelque chose au pourquoi de la mission des Paladins, qu'il me fasse signe) aurait changé grand chose. Pourtant, on aurait bien eu besoin de deux ou trois éclaircissements et évité deux trois ellipses. Rajoutez dessus une sempiternelle histoire familiale qui ne peut être que tragique (attention spoilers, la mère disparue depuis 20 ans est en fait une paladin, arghhh, mon dieu voyez le dilemme qui s'annonce, car bien évidement celui-ci n'est dévoilé qu'à la fin, dans le but de se garder un peu de matière pour une suite).

Enfin, on se demande surtout si Doug Liman n'a pas profité de ce film pour se faire un petit tour du monde aux frais de la princesse, en rendant juste une copie moyenne, passable, proche d'un bon pilote TV (en série, ça aurait fait bander votre serviteur, un pilote pareil. En film, faut quand même pas exagérer non plus...), avec tout de même la sensation que s'il avait eu un scénario un peu plus riche (la grève des scénaristes était passé par là peut-être, et avait limité, on peut l'imaginer, l'accès au papier, à l'encre et à une pelle pour se creuser la soupière), le résultat aurait été bien moins proche du ballon de baudruche. Plutôt que de se lancer dans la désormais inévitable trilogie, un bon gros film d'action plus fourni, conçu comme un seul bloc, plus solide dans son univers et ses interactions, aurait été largement plus efficace.

Conclusion café du commerce, les concepts au cinéma, c'est comme des bouteilles de pinard sérigraphiés, c'est bien beau, mais ça rend pas la piquette meilleure*.




*Cette conclusion a été élue par l'auteur de ce blog meilleure conclusion du blog de tout le temps. Il s'en remercie d'ailleurs vivement.

28 sept. 2010

Taram et le Chaudron Magique


Il fut un temps pas si lointain où j'avais tôt fait de qualifier ce Disney sorti en 1985 de dernier vrai grand dessin animé sorti des usines à rêve de Tonton Walt, tout ce qui venait ensuite n'étant pour moi que vilaine soupe sur-assistée par ordinateur, sur-dégoulinant de chansons sirupeuses et boursoufflé de politiquement correct.

Mais qu'on le veuille ou non, il est jugement que le temps et les évènements de la vie vous obligent à reconsidérer. Et dans ce cas-ci, cela vient par une demoiselle de trois ans et demi qui s'envoie joyeusement depuis une bonne année une grande partie de l'œuvre de la firme de Burbank. Et force est de constater que les 20 dernières années sont loin d'être honteuses pour Disney. Et que Taram est loin d'être le film que j'avais en mémoire, comme une utopie prise à bras le corps et que le réel se fait un malin plaisir à nous renvoyer les scories dans la gueule.

Ils ont pourtant, pendant 12 ans de développement, tout fait pour sortir des carcans de Tonton Walt : pas de chansons ni de passages chantés au cours du film et une adaptation d'un univers d'heroïc fantasy, moins conte de fée, un peu plus sombre. Et vu le four à la sortie, Disney n'a rien fait pour valoriser depuis ce film. Alors oui, The Black Cauldron (en VO) est le film maudit de Disney, mais pas vraiment le chef d'oeuvre maudit que j'encensais jadis.

Plutôt faiblard dans son intrigue et ses ressorts scénaristiques (à part Gurki, les faire-valoir, à commencer par le ménestrel, sont ratés), son animation est également en dents de scie, le cul entre les chaise du style crayonné des Reitherman (Merlin l'Enchanteur, les 101 Dalmatiens, Bernard et Bianca...), de l'envie de se détacher de cet âge d'or (tout en étant écrasé par celui-ci) et des innovations et expérimentations visuelles que l'outil informatique commence à offrir. On passe ainsi de quelques détails des paysages réussis (les reflets des étangs possèdent un réalisme bluffant) à des séquences de poursuites où la gestion du relief et du mouvement ne sont pas dignes du standing Disney.

Et si l'on ne peut nier l'aura du Seigneur des Ténèbres (un grand méchant Disney à mon avis, avec Cruella, Jafar, La Reine et un ou deux autres), s'il faut saluer le réveil et la marche de l'armée des squelettes et enfin cette tentative d'échapper aux carcans de Disney, force est de constater que les tentatives plastiques ne masquent guère le manque de rythme global du long métrage, les lacunes d'un scénario trop léger et des personnages trop peu étoffés. Et on lui préfèrera sans souci son successeur chronologique, Basil Détective Privé, pourtant moins riche visuellement, plus classique dans son histoire, moins audacieux aussi (même si l'audace de Taram est souvent à coté de la plaque) mais plus enlevé, plus rythmé. Plus Disney peut-être aussi.

Taram et le Chaudron Magique ? De la réconciliation de votre serviteur avec Disney par une démarche de désamour objectif...

21 sept. 2010

The Rocky Horror Picture Show


Quelle mouche a donc bien pu piquer la Fox en 1973 pour produire le Rocky Horror Picture Show ? On avait beau être dans une période post-revolution sexuelle, où les moeurs se libéraient légèrement, où l'homosexualité, ou tout du moins l'ambiguïté sexuelle s'affichait un peu plus à travers les accoutrements de Ziggy Stardust et du Glam Rock, où le cinéma aussi commençait à traiter certains sujets plus frontalement. Mais difficile tout de même de comprendre le oui d'un gros studio pour produire ce film, mis à part le certain succés à Londres (le Rocky Horror Show fut joué à Londres sans interruption de 1973 à 1980) de la comédie musicale dont le film est issu.

Mais ce oui de la Fox, nous serons bien l'un des derniers à nous en plaindre. Passons sur le scénario capillotracté épais comme un kleenex et à l'intérêt tout relatif, là n'est pas le plaisir. Tout le plaisir du Rocky Horror Picture Show réside dans son outrancière singularité, cette volonté de faire un musical irrévérencieux, pas sérieux pour 2 sous, rock'n roll dans son sens cru et charnel, une péloche bis et fière de l'être, frontale, amorale et joyeusement foutraque. Rappelons-nous aussi quel choc a pu être un personnage tel que Frank-n-Furter, priapique bisexuel, transgenre joyeusement desaxé, assumant pleinement sa farouche volonté de tremper le biscuit transylvanien partout où la nature lui offre la possibilité. Un tel personnage, en 1973, n'avait rien de socialement évident, et pour se donner une petite idée des réactions hostiles de l'époque, je ne peux que vous conseiller de jeter un œil à l'épisode de la série Cold Case Creatures of the Night (saison 2 épisode 21).

Ultra référentiel (il deviendra pourtant lui aussi une référence quelques années plus tard), Rocky Horror Picture Show est une ode à la déviance joyeuse, à la SF de tout poil (la chanson d'introduction Science Fiction/Double Feature est bourrée de références et de clins d'œil à King Kong, George Pal, l'homme invisible et j'en passe) et au rock libérateur de la fin des 50's. Plusieurs des chansons sont de vrais petits bijoux, ne serait-ce que le Hot Patootie chanté par MeatLoaf, le Time Warp endiablé et sa chorégraphie suggestive ou l'effrontément sexy Sweet Transvestite.

Enfin je reste toujours agréablement émoustillé par la présence de la jolie Susan Sarandon, qui tenait l'un de ses 5 ou 6 premiers rôles sur grand écran, amusé par le duo Riff-Raff/Magenta et par le numéro de macho WASP de Barry Bostwick (que nous retrouverons avec plaisir dans le rôle du maire de NYC dans la plus que correcte sitcom Sin City), ébloui par la performance outrancière et ravageuse de Tim Curry en Dr Frank-n-Furter et toujours étonnamment surpris par la fin du film, totalement en rupture de ton avec le reste du film.

Certains voient en Rocky Horror Picture Show un authentique nanar, à la réputation gonflée par l'ambiance de ses projections cinés et son coté transgressif désormais ringard. Ringard, ce film l'est ouvertement et loin de moi l'envie de le sacrer chef d'oeuvre. Mais il y a un truc dans ce film, une sincérité, cette envie d'être outrancier, de faire un peu du portnawak mais de la faire plutôt correctement. Le Rocky Horror Picture Show, c'est une catharsis positive, 1h30 de défouloir à frustration pleine de mauvais goût qui fait du bien. Et, great scott !, le Rocky Horror Picture Show, ça fait du bien.

20 sept. 2010

Wayne's World


Que reste-t-il de cette comédie qui a connu un succés certain à sa sortie ? Et surtout, alors qu'elle faisait partie de mes comédies cultes au début de mon adolescence à en connaître (d'ailleurs toujours aujourd'hui) des lignes entières de dialogue, quel crédit lui accorder, au delà de la simple pâtisserie proustienne ?

Basé (comme quelques autres) sur des sketches de l'inoxydable Saturday Night Live, Wayne's World a eu du mal tout de même à dépasser ce stade et est essentiellement une succession de
sketches, liés entre eux par une vague histoire de récupération commerciale de l'émission éponyme. Mais il n'est pas spécialement question pour le film (voir les deux ou trois fins Scoubidou) de faire dans le scénario ultra fourni. Il a eu surtout la bonne idée de ne pas faire dans la parodie. Ici le rock est pris un peu au sérieux (Tia Carrere chante vraiment ce qu'elle chante, et les musiciens, même en playback, sont largement crédibles), la BO est assez honnête et ces intentions se voient à l'écran (il faut dire aussi que Penelope Spheeris, la réal, avait fait le docu The Decline of Western Civilization Part II : The Metal Years, ceci expliquant peut-être cela).

Si coté hard rock on a connu plus poilu en terme de musique, Wayne's World vieillit à mon grand étonnement plutôt bien. Quelques sketches restent de haute volée, ne serait-ce que l'introduction Bohemian Raphsody ou la rève de drague façon Garth sur le Foxey Lady de Hendrix, et le duo d'acteur Myers-Carvey fonctionne bien. On restera aussi toujours plutôt amoureux de la belle Tia Carrere (qui, je le rappelle, prête sa voix et de fort belle manière sur tous les titres d'Ultime Razzia). Enfin, coté casting, on soulignera les caméos sympathiques, du coté d'Alice Cooper (dont sa partie ne sera pas doublé en VF, ce qui reste assez rare), de Meat Loaf ou de Robert "T-1000" Patrick, et les seconds rôles savoureux, en particulier celui d'Ed "Al Bundy" O'Brien. Enfin, il faut aussi souligner (et cela avait même était un argument marketing lors de la sortie) le travail d'adaptation des dialogues en français (Chabat et Farrugia) qui, chose assez rare, arrive à garder la dynamique existante en VO et à être parfois plus drôle et inventive. Sans grande surprise, tout cela sonnera, à l'inverse, toc et sera globalement râté dans la suite de 1994

Pour répondre donc aux deux questions du début de cette chronique, il reste de Wayne's World, presque 20 ans après sa sortie, une comédie toujours assez drôle pour que je ne m'y ennuis pas et que je ris une bonne partie du film. A 12 ans, je trouvais ça génial, elle aurait été dans mon top 5 des meilleurs films de tous les temps, à n'en pas douter. J'ai vieilli, et heureusement, Wayne' World ne fait pas partie de mon top5 des meilleurs films, ou du moins des meilleures comédies de tous les temps. Mais assurément, Wayne's World est dans le top5 des meilleures madeleines cinématographiques de mon adolescence.

19 sept. 2010

Tropic Thunder


J'aime les gens qui crachent dans la soupe, quand c'est fait fait avec talent. Et indéniablement, Ben Stiller l'a, ce talent. Comédie du sérail, Tropic Thunder est pourtant féroce avec Hollywood, entre castes d'acteurs, course à l'oscar (Kirk Lazarus est l'acteur typique à Oscar, et il est tous ses rôles à 300%, jusqu'à en devenir noir, gay, idiot...), placements de produits (sachant que l'acteur est lui-même un produit), producteurs ogresques, adoptions d'enfants gérées comme une campagne de com' et tentatives désespérées d'acquérir une crédibilité par le virage du film sérieux, profond, etc. Bref, il caricature, mais pas toujours tant que ça, le microcosme du cinéma, jusque dans ses tics cinématographiques. Citons les bandes-annonces du début du film, dont l'inénarrable Satan's Alley, le "basé sur une histoire vraie" (Tropic Thunder est censé être un bouquin d'un vétéran) et surtout les références aux grands films vietnamesques, entre Apocalypse Now et Platoon (survol d'hélicoptères, napalm, pétages de plomb, amitié virile, musiques 60's et 70's).

Tropic Thunder n'est pas une parodie de film de guerre, même s'il en parodie certains tics. C'est une satire d'une grosse machine hollywoodienne, du rouleau compresseur hollywoodien, voire de son hégémonie (jusqu'aux rebelles du Triangle d'Or). C'est aussi un grand film portnawak, qui ose l'excés, le too much, le gras, le délire, comme Ben Stiller l'a fait dans ses précédentes réalisations Zoolander et l'excellent Disjoncté (avec une sacrée rupture de ton au 2/3 du film). Et si cette comédie est si réussie, c'est aussi grâce à un casting du tonnerre, entre Robert Downey Jr en Kirk Lazarus si sûr de son talent et tellement à coté de ses pompes, Tom Cruise en producteur despotique et fou et Nick Nolte en vrai-faux vétéran.

N'hésitant pas à emmener ses bonnes idées jusqu'au bout (tout cela ne peut que se finir aux Oscars, non ?), Ben Stiller ne verse pas non plus dans la dénonciation du système. Il s'en amuse énormément et nous offre juste un peu de recul, tout en nous proposant un vrai spectacle fun, malin, explosif et indéniablement réussi.

2 sept. 2010

Malice in Lalaland


Pour reprendre, moi aussi, un slogan gauchisant rentré tellement dans la logorrhée marketing qu'il en a perdu tout son sens (et je ne fais ainsi pas exception), un autre cinéma porno est possible, ou pourrait l'être. Et c'est comme ça que Malice in Lalaland se présente.

Je pourrais vous parler des heures du porno, de ce genre quasi mort-né tant ses excrétions sont devenus plus pop-corn que des films de Michael Bay (et je ne m'étendrai pas pas sur les diverses causes). Mais il y a quelques exemples, sporadiques mais marquants, pour prouver que scénario, ambition cinématographique et porno sont compatibles : l'onirique Behind the Green Door, le dérangeant The Devil In Miss Jones (et je suis d'accord avec l'ami Mariaque que je cite, un film ne permettant jamais une "excitation" véritablement "confortable") en sont 2 exemples flagrants. Ailleurs, on a vu que certains cinéastes estampillés comme tel réussissaient à faire du sexe "cru" un objet filmique intéressant (9 Songs), voire passionnant (L'Empire des Sens).

Alors, quand débarque cette année Malice in Lalaland qui affiche clairement quelques velléités transgressives quant aux canons pornographiques en cours depuis près de 25 ans (tourné en 35 mm, bande son résolument rock tendance lourde et, oh miracle!, un scénario fun et un tant soit peu fourni), on est en droit de lâcher un "youpi". Et on a le droit de cracher dans la soupe une fois le film visionné.

C'est bien filmé, jolis extérieurs, belle photo, ça fait presque un choc vu la pauvreté visuelle de 98% de la production X. L'histoire est plutôt barrée, bien menée, avec quelques références sympathiques, et des acteurs (oui oui) bien dirigés et crédibles, et ça aussi ça fait plaisir. Car c'est agréable de regarder un film, conçu comme tel, et pas comme un kleenex souillé, habituel et clichesque compagnon du moindre gonzo, où peu importe le début le milieu et la fin, tant que la dose de membres, d'acrobaties et d'orifice est au rendez-vous. Non, là, en regardant les premières minutes de Malice in Lalaland, on se dit : "enfin un porno que je vais avoir envie de regarder jusqu'au bout". Un vrai film, quoi.

Mais comme je disais plus haut, je vais cracher dans la soupe. C'est bien beau du 35mm, du rock qui tâche, un scénario bien fichu, de bons acteurs. Mais question sexe, on retombe malheureusement dans une production comme toutes les autres, même si celle-là est estampillée alt-porn (c'est à dire des filles pas siliconées, ce qui est il est vrai agréable, tatouées, piercés, et avec des réals aux vagues ambitions "alternatives", mais un porno qui reste pour la plupart du temps tributaire des majors du genre). Pénétrations au marteau-piqueur et attitudes typiques du porno US, montage cut et aucune tentative réellement de secouer le cocotier des clichés. A-t-on toujours besoin de voir l'éjaculation ? Faut-il nécessairement des mecs imberbes ? Le bassin d'un homme est-il absolument un mécanisme aussi frénétique ? Le sexe doit-il être nécessairement à part de l'histoire, avec le traditionnel découpage action/dialogue-scène X-action/dialogue-scène X etc...(et l'on sait, avec Behind the Green Door, que les frères Mitchell ont au moins réussi l'inverse une fois) ?

De fait, et face aux ambitions balancées à nos yeux d'amoureux transi d'un cinéma porno qui n'existe presque pas, je déclare cette tentative raté, purement et simplement. J'irais même jusqu'à parler de supercherie. Et la troublante et convaincante Sasha Grey (ainsi que Ron Jeremy dans un rôle hallucinant, pourtant...) ne peut rien pour sauver tout ça. Malice in Lalaland n'est qu'un porno kleenex de plus, à l'emballage pourtant haut de gamme mais au contenu largement jetable.