2 sept. 2010

Malice in Lalaland


Pour reprendre, moi aussi, un slogan gauchisant rentré tellement dans la logorrhée marketing qu'il en a perdu tout son sens (et je ne fais ainsi pas exception), un autre cinéma porno est possible, ou pourrait l'être. Et c'est comme ça que Malice in Lalaland se présente.

Je pourrais vous parler des heures du porno, de ce genre quasi mort-né tant ses excrétions sont devenus plus pop-corn que des films de Michael Bay (et je ne m'étendrai pas pas sur les diverses causes). Mais il y a quelques exemples, sporadiques mais marquants, pour prouver que scénario, ambition cinématographique et porno sont compatibles : l'onirique Behind the Green Door, le dérangeant The Devil In Miss Jones (et je suis d'accord avec l'ami Mariaque que je cite, un film ne permettant jamais une "excitation" véritablement "confortable") en sont 2 exemples flagrants. Ailleurs, on a vu que certains cinéastes estampillés comme tel réussissaient à faire du sexe "cru" un objet filmique intéressant (9 Songs), voire passionnant (L'Empire des Sens).

Alors, quand débarque cette année Malice in Lalaland qui affiche clairement quelques velléités transgressives quant aux canons pornographiques en cours depuis près de 25 ans (tourné en 35 mm, bande son résolument rock tendance lourde et, oh miracle!, un scénario fun et un tant soit peu fourni), on est en droit de lâcher un "youpi". Et on a le droit de cracher dans la soupe une fois le film visionné.

C'est bien filmé, jolis extérieurs, belle photo, ça fait presque un choc vu la pauvreté visuelle de 98% de la production X. L'histoire est plutôt barrée, bien menée, avec quelques références sympathiques, et des acteurs (oui oui) bien dirigés et crédibles, et ça aussi ça fait plaisir. Car c'est agréable de regarder un film, conçu comme tel, et pas comme un kleenex souillé, habituel et clichesque compagnon du moindre gonzo, où peu importe le début le milieu et la fin, tant que la dose de membres, d'acrobaties et d'orifice est au rendez-vous. Non, là, en regardant les premières minutes de Malice in Lalaland, on se dit : "enfin un porno que je vais avoir envie de regarder jusqu'au bout". Un vrai film, quoi.

Mais comme je disais plus haut, je vais cracher dans la soupe. C'est bien beau du 35mm, du rock qui tâche, un scénario bien fichu, de bons acteurs. Mais question sexe, on retombe malheureusement dans une production comme toutes les autres, même si celle-là est estampillée alt-porn (c'est à dire des filles pas siliconées, ce qui est il est vrai agréable, tatouées, piercés, et avec des réals aux vagues ambitions "alternatives", mais un porno qui reste pour la plupart du temps tributaire des majors du genre). Pénétrations au marteau-piqueur et attitudes typiques du porno US, montage cut et aucune tentative réellement de secouer le cocotier des clichés. A-t-on toujours besoin de voir l'éjaculation ? Faut-il nécessairement des mecs imberbes ? Le bassin d'un homme est-il absolument un mécanisme aussi frénétique ? Le sexe doit-il être nécessairement à part de l'histoire, avec le traditionnel découpage action/dialogue-scène X-action/dialogue-scène X etc...(et l'on sait, avec Behind the Green Door, que les frères Mitchell ont au moins réussi l'inverse une fois) ?

De fait, et face aux ambitions balancées à nos yeux d'amoureux transi d'un cinéma porno qui n'existe presque pas, je déclare cette tentative raté, purement et simplement. J'irais même jusqu'à parler de supercherie. Et la troublante et convaincante Sasha Grey (ainsi que Ron Jeremy dans un rôle hallucinant, pourtant...) ne peut rien pour sauver tout ça. Malice in Lalaland n'est qu'un porno kleenex de plus, à l'emballage pourtant haut de gamme mais au contenu largement jetable.

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